Royaume-Uni : Réduction des charges sociales sur la vente

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Royaume-Uni : Réduction des charges sur la vente
Royaume-Uni : Réduction des charges sur la vente

RÉDUCTION DES CHARGES SOCIALES POUR LES RÉSIDENTS BRITANNIQUES VENDANT LEUR RÉSIDENCE SECONDAIRE FRANÇAISE APRÈS LE BREXIT

 

 

Les résidents britanniques qui cherchent à vendre leur résidence secondaire française ont vu leur exposition fiscale s’accroître de manière significative à la fin de la période de transition du Brexit, le 31 décembre 2020 (de 7,5 % à 17,2 %).

Le fisc français revient à sa position d’avant le Brexit [1], un geste inattendu.

 

Pour résumer

Les cotisations de sécurité sociale, appelées contribution sociale généralisée (CSG) et contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) ont été mises en place dans les années 1990 pour tenter de réduire le déficit du régime français de sécurité sociale couvrant les prestations de maladie, de maternité et de retraite.

Leur caractère juridique (impôts ou charges sociales) a sans cesse été au cœur des débats. Le Conseil constitutionnel et les deux juridictions suprêmes françaises, le Conseil d’État (ordre administratif) et la Cour de cassation (ordre civil) semblaient avoir des avis différents sur la question.

Jusqu’au 1er août 2012, les non-résidents étaient tout simplement exonérés de la CSG/CRDS car ils étaient censés être couverts par leurs propres régimes de sécurité sociale.

Par conséquent, les conventions visant à éviter les doubles impositions, à l’instar de la Convention conclue entre le Royaume-Uni et la France du 21 juin 2008, excluent les CSG/CRDS. L’Administration fiscale et douanière britannique (HMRC) a confirmé cette position sur son site web : elles ne peuvent être portées au crédit au Royaume-Uni.

Le gouvernement français issu des élections générales de juin 2012 (François Hollande) a estimé que cette exonération était « injustifiée » et a décidé d’assujettir aux taxes les résidents et les non-résidents dans le budget supplémentaire de la loi de finances rectificative LFR 2012 du 31 juillet 2012.

L’affaire a été portée devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qui, le 26 février 2015 (C-623/13 de Ruyter), a confirmé que la CSG et la CRDS constituent des charges sociales, directement liées à la sécurité sociale française et que le prélèvement de la CSG/CRDS appliqué à d’autres résidents de l’UE était contraire au règlement (UE) 1408/71. Les montants prélevés ont été remboursés avec intérêts.

Le gouvernement français a réagi en réaffectant le produit de la CSG/CRDS à des « prestations non contributives » (c’est-à-dire accordées aux contribuables français comme aux non-contribuables) à partir du 1er janvier 2016. L’idée était de « dissocier » techniquement la cotisation de sa prestation.

La juridiction administrative n’a visiblement pas été convaincue et a confirmé les principes énoncés par l’affaire C-623/13 de Ruyter le 31 mai 2018 (CAA Nancy 31-5-2018 17NCO2124) jugeant la disposition illégale.

Dans l’intervalle, dans l’affaire (C-45/17 18 janvier 2018 Jahin), la CJUE a confirmé que le fait de traiter différemment les résidents de l’UE et ceux des pays tiers n’était pas contraire aux articles 63 et 65 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) (liberté de circulation), ouvrant la voie à une hausse postérieure au Brexit.

Au sein de l’UE, le gouvernement français semble avoir finalement capitulé dans le budget 2019 de la sécurité sociale qui a confirmé que la CSG/CRDS ne devait plus être prélevée aux résidents de l’UE. Une fois de plus, les montants prélevés illégalement depuis le 1er janvier 2018 ont été remboursés.

Pas tout à fait cependant, puisque le prétendu prélèvement de solidarité finançant le crédit universel français est demeuré exigible et a été porté de 2 % à 7,5 % à partir du 1er janvier 2019.

En tout état de cause, ce débat franco-européen est devenu sans objet après le Brexit et les résidents britanniques sont redevenus assujettis à la CSG/CRDS au taux plein de 17,2 %.

La mise à jour

Tel était le cas jusqu’à la mise à jour de la « Foire aux questions (FAQ) sur le Brexit à destination des particuliers » publiée sur le site web de l’Administration fiscale française [2] le 14 janvier 2022, dans laquelle l’Administration fiscale a confirmé que l’exonération de CSG/CRDS sur les revenus et gains tirés de biens immobiliers français continue de s’appliquer aux résidents britanniques malgré la sortie du Royaume-Uni de l’UE le 1er janvier 2021.

L’article fait remarquer « compte tenu des accords de sortie de l’UE signés le 12 novembre 2019 et le 30 décembre 2020, cette exonération continue de s’appliquer aux revenus d’actifs perçus à compter du 1er janvier 2021 pour les contribuables qui remplissent les conditions suivantes » :

  • ils sont affiliés à la sécurité sociale britannique ;
  • ils sont ressortissants ou résidents légaux de la France, du Royaume-Uni ou d’un autre État membre de l’Union européenne ;
  • ils ne relèvent pas d’un régime obligatoire de sécurité sociale français.

Par conséquent, les revenus d’actifs français ne seront pas soumis à la CSG et à la CRDS mais resteront soumis au prélèvement de solidarité au taux de 7,5 % prévu à l’article 235 ter du CGI ».

La disposition s’applique rétroactivement à partir du 1er janvier 2021 et les contribuables prélevés de manière illicite ont droit à un remboursement dans le délai général de réclamation fixé par l’article R 196-1 LPF (expirant le 31 décembre de la deuxième année du fait générateur de la taxe).

Même si l’opposabilité d’une réponse à une « Foire aux questions » est discutable tant que la position n’a pas été confirmée dans le Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFIP), le fisc français semble fonder sa position sur les accords du Brexit, en laissant entendre que l’exonération pourrait s’appliquer automatiquement lorsque les conditions sont remplies.

À cet égard, l’article D. 136-4 du Code de la Sécurité Sociale stipule que, pour bénéficier de l’exonération de la CSG/CRDS, le contribuable doit produire les formulaires européens S1 et A1 ou toute « attestation d’affiliation équivalente […] délivrée par l’organisme auquel la personne est affiliée ».

 

Auteur: Patrick Delas, Russell-Cooke LLP, Londres

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À propos de l’auteur

Patrick Delas est associé senior de l’équipe Droit français et Propriété foncière au sein du cabinet Russell-Cooke LLP. Il peut être contacté par e-mail à : Patrick.delas@russell-cooke.co.uk.

[1] https://www.impots.gouv.fr/portail/consequences-fiscales-du-brexit

[2] https://www.impots.gouv.fr/sites/default/files/media/1_metier/5_international/brexit/20220209_faq_brexit_particuliers_EN.pdf

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