Allemagne : Investissements étrangers en Allemagne – Coup de projecteur sur trois aspects sélectionnés

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A.  Conventions de prêts convertibles : forme spécifique à respecter ?

I.  Instruments financiers

Les prêts convertibles sont des instruments de financement prisés par les PME en démarrage et les entreprises axées sur la croissance. Ils peuvent être structurés rapidement et facilement et offrent une grande flexibilité aux deux parties au contrat de financement. Ils permettent notamment d’éviter des discussions laborieuses sur la valorisation de l’entreprise, qui seraient reportées ultérieurement. Les prêts convertibles sont très répandus lorsque des données et des critères compréhensibles pour la valorisation de l’entreprise ne sont pas suffisamment mis à disposition en raison de la phase respective de l’entreprise (par ex., phase de démarrage ou de croissance, restructuration, consolidation).

II.  Nature juridique

En droit allemand, un prêt convertible est une obligation contractuelle fondée sur une relation de prêt. Il comprend au moins tous les éléments essentiels d’une convention de prêt, tels que la détermination des parties, le montant du prêt, le taux d’intérêt, la garantie, l’obligation de remboursement au comptant et l’accord relatif à l’échéancier de paiement. Il peut être complété par des engagements financiers de complexité variable.

La structure fondamentale est ensuite complétée par un accord de conversion polyvalent, selon lequel l’emprunteur, à savoir l’entreprise, peut également remettre des actions de l’entreprise pour honorer la créance de remboursement du prêt. Cette idée peut être structurée comme une créance du prêteur ou de l’emprunteur, ou une combinaison des deux. La conversion du cycle de financement est quasi systématiquement assimilée à un événement de conversion exceptionnel. Cela signifie que le prêteur peut convertir le prêt en actions si de nouveaux investisseurs sont acceptés ou si la portée des investissements existants est étendue dans le cadre d’un cycle de financement. Dans ce cas, la valorisation est déterminée par le cycle de financement. Le prêteur peut alors convertir le prêt à recevoir en actions avec une décote par rapport à cette valorisation. La décote récompense le risque pris par le prêteur. Enfin, des stipulations relatives à la subordination et une prime de sortie sont incluses pour réaliser la finalité du financement. La subordination garantit en outre que l’octroi du prêt convertible ne constitue pas une opération de crédit nécessitant un agrément au sens de la législation en matière de surveillance bancaire.

  • Aspects formels

Pour réaliser la conversion, l’emprunteur a besoin des actions de l’entreprise dont il peut disposer pour les céder à l’emprunteur. Il peut s’agir d’actions déjà existantes en vertu du droit des sociétés ou d’actions nouvelles à créer. Il n’est possible de créer de nouvelles actions (outre la scission d’actions) que par le biais de mesures d’augmentation de capital. Pour ce faire, le capital autorisé en vertu du droit des sociétés peut être utilisé ou le capital social de l’entreprise doit être augmenté.

L’augmentation de capital peut constituer une modification des statuts. S’il s’agit d’une SARL de droit allemand (GmbH), la résolution doit être passée devant notaire (article 53 de la loi allemande sur les SARL [GmbHG]) ; s’il s’agit d’une société anonyme, la résolution y afférente de l’assemblée générale doit être passée devant notaire (article 181 de la loi sur les sociétés anonymes [AktG]).

Toutefois, ces formalités concernent uniquement le canal de mise en œuvre. Les conventions de prêts de conversion étaient autrefois conclues par écrit.

Dans une affaire portant sur la législation en matière d’insolvabilité, le tribunal régional supérieur de Zweibrücken, dans sa décision du 17/05/2022, dossier numéro 8 U 30/19, a statué de manière surprenante qu’une convention de prêt convertible ne peut être effectivement conclue avec l’intervention d’un notaire que si cette dernière énonce déjà des déclarations de rachat des nouvelles actions de l’entreprise qui seront créées par des actionnaires non participants jusqu’alors. Les déclarations de rachat doivent être passées devant notaire (article 55 GmbHG). Cette décision a suscité un débat animé dans les publications notariales et juridiques sur la forme (légalisation et/ou certification devant notaire) à respecter lors de la conclusion de conventions de prêts convertibles. La Cour fédérale de justice n’a pas encore statué en la matière, la juridiction suprême manque donc de clarté. En tout état de cause, la nullité du contrat doit être évitée dans tous les cas de figure pour toutes les parties concernées. Une réparation ex post avec effet rétroactif (ex tunc) n’est pas possible. L’investisseur risque de perdre sa (future) participation dans l’entreprise. Elle est ramenée à un droit à faire valoir une indemnisation selon les principes de l’enrichissement sans cause. L’entreprise ou sa direction est confrontée à des difficultés en cas de crise ou d’insolvabilité, car une subordination concernant la demande de concession n’aurait pas été convenue. Dans ce cas, l’entreprise peut exercer des recours contre la direction (article 15b de la loi allemande sur l’insolvabilité [InsO]) qui pourraient anéantir l’entreprise. Outre l’obligation de légalisation en vertu de l’article 55 GmbHG, l’avis sur l’obligation de légalisation figure également dans les ouvrages concernant l’article 15, alinéa 4 GmbHG.

Compte tenu de la diversité des approches théoriques présentées, il est fortement recommandé dans la pratique de ne pas rédiger et convenir de conventions de prêts convertibles sans l’avis d’un expert en droit allemand des sociétés. Dans le doute, la convention doit être passée devant notaire pour éviter toute mauvaise surprise ultérieurement.

B.  Actualités du droit fiscal – Loi de 2024 sur les opportunités de croissance

La loi dite Wachstumschancengesetz (loi sur les opportunités de croissance) a été promulguée au Journal officiel fédéral le 27 mars 2024. Bien qu’elle n’ait pas répondu aux grandes attentes qui avaient été définies pour cette loi de développement économique axée sur la fiscalité au début du processus législatif, certaines modifications ont été apportées dans le but de promouvoir les investissements en Allemagne en tant que pôle économique.

I.  Renforcement du financement interne

La loi sur les opportunités de croissance améliore de façon temporaire les possibilités de financement interne des entreprises ou des investissements grâce aux mesures suivantes :

  • Pour les immobilisations mobilières acquises ou fabriquées entre le 1eravril 2024 et le 1er janvier 2025, un amortissement dégressif pouvant aller jusqu’à 20 % et un amortissement linéaire plafonné à 2 fois seront instaurés.
  • L’impact économique de l’amortissement exceptionnel des investissements en biens meubles prévu à l’article 7g de la loi allemande relative à l’impôt sur le revenu (EStG) est doublé, passant de 20 % à 40 %.
  • Introduction d’un taux d’amortissement dégressif de 5 % pour les immeubles à usage d’habitation si la construction débute après le 30 septembre 2023 et avant le 1eroctobre 2029 (ou si le contrat d’acquisition juridiquement contraignant est conclu après le 30 septembre 2023 et avant le 1er octobre 2029). Cette possibilité est un soutien majeur aux investissements dans les biens immobiliers à usage d’habitation en location.
  • Le délai d’application du règlement relatif à l’amortissement exceptionnel supplémentaire de 5 % pour les logements locatifs prévu à l’article 7b EStG a été prolongé et est privilégié dans les conditions d’application.

II. Impôt sur les sociétés facultatif pour les sociétés de personnes, article 1a de la loi allemande relative à l’impôt sur les sociétés (KStG)

Les entreprises en Allemagne sont imposées au taux uniforme de 15 % d’impôt sur les sociétés. En revanche, les revenus des sociétés de personnes sont imposés en toute transparence selon le niveau d’imposition des associés détenant une participation dans la société et individuellement pour chaque associé. La taxe professionnelle est par ailleurs prélevée séparément au niveau de l’entreprise pour les deux sociétés. Les revenus des associés dans les sociétés de personnes étant imposés au taux progressif de 14 % à 45 % au maximum, l’impôt forfaitaire sur les sociétés peut désormais être appliqué aux sociétés de personnes et aux sociétés civiles enregistrées et non plus seulement aux sociétés de personnes à des fins commerciales, différant ainsi l’impôt progressif sur les sociétés.

  • La facture électronique remplace les factures papier.

Outre les réglementations favorables susmentionnées, il convient de mentionner un autre élément de la loi sur les opportunités de croissance, à savoir la mise en place de la facturation électronique obligatoire dans le secteur B2B en Allemagne à partir du 1er janvier 2025. À compter de cette date, les entreprises seront tenues d’utiliser uniquement des factures dans un format de données standardisé à des fins fiscales. L’ère des factures papier est révolue. Il est vivement conseillé aux petites et moyennes entreprises de clarifier au préalable les exigences techniques.

III.  Loi allemande sur la modernisation du droit des sociétés de personnes (MoPeG)

La loi allemande sur la modernisation du droit des sociétés de personnes (MoPeG) est entrée en vigueur le 1er janvier 2024. Elle codifie des décennies de jurisprudence et les ouvrages spécialisés y afférents, abolit les principes de copropriété et de propriété individuelle qui caractérisent le droit des sociétés de personnes depuis plus d’un siècle et introduit enfin la capacité juridique des sociétés de personnes de droit civil si elles sont inscrites au registre des sociétés civiles (GbR) nouvellement créé. Les changements sont de grande envergure, c’est pourquoi la loi MoPeG est considérée comme la réforme du siècle en matière de droit des sociétés.

Alors qu’auparavant les sociétés de personnes à des fins commerciales devaient s’inscrire au registre du commerce, les sociétés civiles ou de droit civil (BGB-Gesellschaft ou GbR) peuvent désormais également s’inscrire. Une société de personnes doit s’inscrire si elle acquiert un droit enregistré (par ex., une propriété). Cela est source de clarté et de sécurité dans les actes juridiques. En s’inscrivant au registre, les sociétés civiles enregistrées (eGbR) peuvent dorénavant participer aussi à un processus de conversion conformément à la loi allemande relative aux transformations de société (UmwG).

Ce qui précède est uniquement un aperçu informatif du sujet. Étant donné que les effets de la réforme sur les statuts des sociétés de personnes sont multiples et que les conséquences fiscales peuvent être importantes dans des cas particuliers, je vous recommande de demander conseil à un expert pour vérifier si les modifications apportées par la loi MoPeG sont pertinentes pour votre entreprise.

Auteur : Christoph Schmitz-Schunken, DHK Attorney & Tax advisors (Aix-la-Chapelle)
www.ctc.legal

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