Depuis l’entrée en vigueur du Règlement (UE) n° 650/2012 relatif aux successions transfrontalières, la notion de résidence habituelle est devenue un pilier pour déterminer le droit applicable à la succession du défunt. Ce Règlement, applicable à tous les États membres de l’UE, hormis le Danemark et l’Irlande, ne met plus l’accent sur la nationalité (traditionnellement suivie en Espagne en vertu de l’article 9.8 du Code civil) mais sur la résidence habituelle du défunt au moment du décès. Ce changement a des répercussions importantes pour l’Espagne, une juridiction qui compte un grand nombre d’expatriés, de retraités et de résidents de longue durée originaires d’autres États membres et de pays tiers. Conformément à l’article 21.1 du Règlement, la législation de l’État dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle régit l’intégralité de la succession, les biens mobiliers et immobiliers, sauf si elle présente des liens manifestement plus étroits avec un autre État, ou si le défunt a opté pour sa loi nationale en vertu de l’article 22 (professio iuris). Les tribunaux espagnols se sont progressivement adaptés à ce changement de paradigme, privilégiant une analyse factuelle au cas par cas pour déterminer la résidence habituelle. Des éléments tels que la durée et la stabilité de la résidence, l’intégration dans l’environnement local ainsi que les liens personnels et économiques du défunt sont pris en compte. Dans les cas litigieux, par exemple ceux impliquant des ressortissants britanniques propriétaires de résidences secondaires en Espagne, les tribunaux doivent évaluer si leurs liens avec l’Espagne l’emportent sur ceux avec le Royaume-Uni, notamment après le Brexit, lorsque les ressortissants britanniques sont assimilés à des ressortissants de pays tiers. D’un point de vue juridique, la détermination de la résidence habituelle a une incidence, non seulement sur le droit successoral applicable, mais aussi sur la compétence de l’Espagne pour traiter les procédures successorales en vertu de l’article 4 du Règlement. De plus, le droit fiscal espagnol continue de s’appliquer indépendamment : même si la succession est régie par un droit étranger, l’impôt espagnol sur les successions (ISD) est prélevé sur les biens situés dans le monde entier pour les résidents espagnols, et sur les biens espagnols pour les non-résidents. Ce système à deux niveaux – règles européennes harmonisées en matière de conflits de lois et règles fiscales nationales – exige une coordination minutieuse dans les successions transfrontalières. Les juristes doivent être attentifs aux éventuelles disparités entre les conséquences civiles et fiscales, notamment lorsque la résidence du défunt, la localisation des biens et la résidence des héritiers relèvent de plusieurs juridictions. Dans ces contextes, des instruments de planification tels que les testaments avec professio iuris et l’établissement de l’assiette d’imposition pré-mortem sont non seulement conseillés, mais essentiels. Auteur : LEXUNION ESPAÑA, Barcelone (Espagne)
L’impact de la résidence habituelle sur les successions transfrontalières : un point de vue espagnol dans le cadre du règlement UE 650/2012
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